Prise de parole liminaire de Nathalie Perrin-Gilbert en Conseil Municipal

Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs les élus, Mesdames et Messieurs,

Il y a six jours Lyon fêtait la musique et je tiens à remercier et féliciter les équipes qui ont préparé cette édition avec moi. Chacune, chacun d’entre nous a pu croiser ce 21 juin énormément de monde partout dans la ville, s’arrêter devant les scènes et espaces mis à disposition des musiciens professionnels comme des artistes amateurs, se réjouir que la cour de l’Hôtel de Ville soit investie une nouvelle fois, apprécier combien la Fête de la Musique renouait petit à petit avec l’esprit qui l’a vue naître en 1982 sous l’impulsion de Jack Lang et Maurice Fleuret. L’ambiance était joyeuse, avec des Lyonnaises et Lyonnais heureux de fêter la musique et sa pratique, toutes esthétiques confondues.

Quand avec les équipes nous pensions la version 2024 de la Fête de la Musique au mois de janvier dernier, nous n’imaginions pas que les Lyonnaises et les Lyonnais auraient autant besoin de ce moment de  partage, de métissage musical, culturel, générationnel, social, … que la soirée du 9 juin serait passée par là. Nous pouvions craindre le score de l’extrême droite au regard de sa progression partout en Europe et aux portes-mêmes de la France. Mais nous n’imaginions pas que le Président de la République française prendrait le risque fou de dissoudre l’Assemblée Nationale le soir même de l’élection européenne, pariant sur les divisions de la gauche, comptant sur les réflexes de peur et précipitant au final notre pays dans une zone chaotique et terriblement dangereuse.

Depuis face à cet inimaginable il a fallu agir vite et se positionner. Que le Nouveau Front Populaire soit un cartel partisan, c’est exact. Que les partis se soient partagé les circonscriptions sur la base de calculs électoraux présents et à venir semble une évidence. Mais le Nouveau Front Populaire est aussi bien plus que cela, et nous le devons d’abord au peuple de gauche et plus globalement à tous les citoyennes et citoyens qui ont fait entendre leur voix, leur désir d’union, pressant les responsables politiques de gauche à trouver un accord électoral. Depuis, des voix du monde de la culture, du sport, des associations, des medias indépendants, des universitaires, des économistes, …, expriment leur refus de voir notre pays gouverné par des forces d’extrême droite avec le repli tout à la fois social, économique, culturel, fraternel qu’un tel gouvernement provoquerait. Le repli, sinon le chaos.

Sans doute, cet accord électoral à gauche est-il à ce stade un mariage de raison et il faudra poursuivre le travail pour clarifier un certain nombre de positionnements et de propositions. Mais l’essentiel est fait pour l’immédiat : construire la digue.
Sans doute, au-delà d’une gauche dont nous devrons continuer de définir les contours républicains et universalistes, faudra-t-il s’ouvrir à d’autres forces démocrates. Et ce dès le soir du 1er tour de l’élection législative afin d’éviter des triangulaires partout où celles-ci pourraient favoriser le candidat ou la candidate représentant l’extrême-droite.  C’est grâce à l’ensemble des forces démocrates que la digue pourra tenir.
Car c’est bien cela qui est désormais en jeu. Notre capacité à faire République commune, notre détermination à redéfinir un fonctionnement démocratique qui permet, et protège même, les contre-pouvoirs, qui considère et respecte les corps intermédiaires, qui lutte sans relâche et sans aucune ambiguïté contre le racisme et contre l’antisémitisme, qui érige l’éducation et la culture comme les fondements d’une même citoyenneté.

Oui, ce moment d’Histoire nous oblige. Le Président de la République a parlé des masques qui allaient devoir tomber. Oui… mais les masques ne sont pas forcément là où Emmanuel Macron sous-entendait qu’ils seraient.
Je dois dire ici en tant que Lyonnaise, et même si je ne partage pas sa vision économique, sociale et sociétale, j’ai été reconnaissante à notre Droite de ne pas s’engouffrer dans la brèche ouverte par le sinistre Monsieur Ciotti. Je vous l’ai dit d’ailleurs Monsieur Oliver, ou Madame Croizier. 
De même, Messieurs Cucherat, Kimelfeld, Képénékian, Levy, Madame Bacha-Himeur, nous avons eu l’occasion d’échanger sur la situation nationale… Et  même si c’était à titre très informel, il était bon de constater que nous partagions cette évidente conscience que malgré un habile ravalement de façade le Rassemblement National restait ce parti d’extrême droite haineux et dangereux.
Sans ignorer ni renier bien évidemment nos différences de bagages et d’histoire politiques, je serai pour ma part attentive à ce que le dialogue et le respect entre les forces démocrates ne se perde pas à Lyon.

Lyon est depuis longtemps un terrain d’expérimentation pour l’extrême-droite avec des groupuscules bien visibles et des liaisons dangereuses beaucoup plus discrètes mais pas moins inquiétantes. Mais cela ne se concrétisait pas vraiment par le vote des Lyonnais et Lyonnaises, ou du moins ce vote restait-il relativement marginal et géographiquement limité. Ce ne fut pas le cas le 9 juin dernier et il serait se mentir que de ne pas prendre acte de cette poussée du vote extrémiste.
 C’est un réflexe de peur qui a fonctionné, une inquiétude face au déclassement, un ras le bol des écarts entre les paroles et les actes, le désespoir de se dire –à tort- qu’on a tout essayé et que « pourquoi pas le RN après tout ? ».

Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs les élus, il n’y a pas de représentant du Rassemblement National ni de Reconquête sur ces rangs issus des élections de 2020. Je dis tant mieux et je l’assume. Mais pouvoir le dire et l’assumer, il nous faut reconnaître que nous n’avons pas été élus par une majorité de Lyonnaises et de Lyonnais. Car, contrairement à ce qui est annoncé pour ce dimanche et tant mieux pour ce dimanche, le taux de participation était faible en 2020. Cela doit nous inviter à l’humilité et à l’écoute.
Et  tout en luttant pied à pied contre l’idéologie nauséabonde et violente de l’extrême droite, nous devons tenir compte de la détresse et de la colère d’une certaine partie de ses électeurs à Lyon. Nous devons réinterroger une partie de nos politiques publiques au regard de ce vote qui, disons-le clairement, a porté la question des inégalités économiques, sociales et territoriales sur le devant de la scène.

D’où, si j’en viens à la séance de ce jour, l’importance de donner en lien avec la Métropole une forte ambition aux différents plans qu’il nous est proposé de voter aujourd’hui, que ce soit le plan habitat ou le plan emploi-insertion. Il ne serait rien de pire que de se contenter de bonnes et louables intentions sans réels moyens d’actions. Le groupe Lyon en Commun interviendra et votera favorablement sur ces deux délibérations.

D’où l’importance aussi d’une vision du devenir de notre ville, une vision dont on s’assure qu’elle est bien désirable par les habitants et les différents acteurs du territoire. Et parce que nous sommes quelque peu soucieux d’une Presqu’Ile qui deviendrait à vivre d’abord pour les touristes et les grandes enseignes, les familles et les commerces de proximité n’ayant pu s’y maintenir, nous nous abstiendrons sur le projet de délibération concernant la Presqu’Ile. 
Enfin et pour terminer, parce que finalement il a été question de Résistance durant mon intervention, en tant qu’ancienne adjointe à la Culture qui a pris tant de plaisir à travailler avec les équipes du Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation (CHRD) je voudrais saluer ici la famille de Madame Denise Domenach, grande résistante lyonnaise dont le nom va à être donné au groupe scolaire dit actuellement « Berthelot », du nom de l’avenue sur laquelle il se trouve.

C’est un réel bonheur pour moi de savoir que cette école située juste en face du CHRD portera demain le nom de cette grande Dame de la Résistance à l’occupation nazie.
Je vous remercie de votre attention.