Nous nous rangerons toujours du côté de la colère du peuple quand l’Etat devient répressif

Monsieur le maire, Chers collègues,

Avant de démarrer mon propos liminaire, permettez-moi un hommage en ma qualité d’adjoint au LI-QVA, mais aussi au nom de tous les élus LYEC.

Nous avons eu la tristesse, il y a une quinzaine de jours, d’apprendre le décès soudain de Madame Zohra Ferhat, fondatrice et directrice de l’Olivier des Sages. C’était le 29 avril dernier.
Nous gardons et garderons de Zohra Fehrat le souvenir d’une femme lumineuse, courageuse, généreuse, d’une femme portée par ses convictions, son idéal humaniste, son souci de l’autre.
Et parmi l’autre, parmi les autres, les plus vulnérables.

Zohra Ferhat était aux côtés des personnes rendues vulnérables par le vieillissement, par une situation économique et sociale fragile, par l’isolement, par la barrière de la langue ou la fracture du tout numérique. Elle était aux côtés des Algériens et Algériennes installés en France et parmi eux les Chibanis.
Nous garderons de Zohra Ferhat son engagement au service des solidarités, du dialogue et de la reconnaissance de l’égale dignité de chacune et chacun.

Le groupe Lyon en Commun présente ses condoléances à sa famille, à ses proches, aux salariés, aux bénévoles et aux usagers de l’Olivier des Sages.

Mais monsieur le maire, Chers collègues,

En propos liminaire, je voudrais évoquer avec vous trois sujets qui font partie de notre actualité et qui nous obligent à cet instant à prendre le temps de repenser à ce qui constitue les fondements de notre engagement politique. Mais aussi à repenser aux raisons qui ont poussées les électeurs à confier ce mandat municipal aux forces de gauche et écologistes que nous incarnons.

Depuis plusieurs années maintenant, la France est traversée par de puissants mouvements sociaux qui marquent à bien des égards, le retour des classes populaires sur la scène politique.
Je pense naturellement : aux Gilets Jaunes,
Je pense aussi : aux manifestations de 2016 contre la Loi Travail, au Mouvement #MeToo, aux marches pour le Climat depuis 2018 aux grèves et manifestations contre la réforme des retraites qui durent depuis 2019, et à la mobilisation permanente des citoyens et des forces écologistes contre tous les projets qui constituent une prédation trop grande sur la nature.

Je tenais à dire au sein de cette assemblée toute la solidarité de notre groupe Lyon en commun avec les revendications qu’ils portent, dès lors qu’elles concernent
le partage des richesses
l’émancipation des travailleurs
la lutte contre l’inaction climatique
l’égalité des droits
et bien entendu la lutte contre toutes les formes de violence, y compris policière.

Alors oui, notre ville a connu dernièrement des nuits et des jours houleux et violents. Et oui, à quelques reprises des bâtiments publics ont été pris pour cible par la colère de quelques-uns.

Mais devons-nous / nous contenter de condamner cela ?
Ou devons-nous aussi nous interroger sur les raisons qui poussent certains de nos concitoyens à s’en prendre aux symboles les plus locaux, les plus immédiats de la République ?

Je pense, qu’à travers les dégradations des mairies du 1er, du 3ème et du 4ème, ce ne sont pas Yasmine Bouagga, Remi Zinck et Véronique Dubois-Bertrand ni leurs lignes politiques qui sont visés, mais bien ce que les mairies symbolisent aussi : l’Etat et le gouvernement.
Et je tiens d’ailleurs à dire tout notre soutien à vous trois, dans ces moments compliqués où la colère du Peuple s’exprime de façon disproportionnée et se trompe parfois de cible en insultant la république et le service public de proximité plutôt que l’Etat et ce gouvernement sourd à la colère populaire.

Chers amis, il faut se rendre à l’évidence : le Peuple n’est pas heureux, il est en colère et il l’exprime.

Et nous ne pouvons pas faire comme si cela n’était que le fait de groupuscules obscures et extrémistes qu’un coup de matraque chaque jour un peu plus-dur permettrait de neutraliser.
La crise est beaucoup plus profonde et ne pas l’entendre, ne pas chercher à la comprendre, c’est aller au-delà de difficultés encore plus grandes.
Je mets d’ailleurs en garde toutes celles et ceux qui instrumentalisent ces mouvements et tentent, en vain, de décrédibiliser les militants, les manifestants.
Je pense notamment à celles et ceux qui qualifient les militants écologistes ou syndicaux de « gauchistes » et qui dressent sans honte un signe égal entre extrême-gauche et extrême-droite.

Pourtant, il n’est pas besoin d’être agrégé en sciences politiques pour voir que tout oppose ces deux idéologies, que ce soit : sur les questions économiques, sur les questions liées aux droits des minorités et plus largement sur la vision de la société.

Petites astuces pour les différencier :
Rappelons-nous que l’extrême gauche porte des valeurs liés notamment : au féminisme, à l’antiracisme, à l’écologie, à la démocratie participative, et à l’anticapitalisme
Du côté de l’extrême-droite en revanche, on trouve un intérêt marqué pour : le nationalisme, l’opposition à l’immigration, l’autoritarisme, et le conservatisme

Chacun voit donc bien la différence, et quiconque s’aviserait de dresser un signe égal entre les deux se rendrait de fait coupable de mensonge ou de bêtise.
Dans la même logique, la distinction gauche / droite existe bel et bien, et les marqueurs distinctifs sont bien connus.

Ce qui me permet d’aborder avec vous le deuxième point : la vidéosurveillance.
Car à ce moment de l’Histoire où nous / nous trouvons, quand la démocratie telle que nous la connaissions depuis des décennies
tend à valider la domination d’une classe sur une autre,
tend à ignorer la parole du peuple au profit d’une quelconque idéologie
tend à saccager la nature pour satisfaire quelque lobby

Est-il nécessaire que nous, écologistes de gauche, nous soyons celles et ceux qui ajoutent encore à l’arsenal répressif un moyen de contrôle des citoyens.
Faut-il que vous, cher Grégory Doucet, soyez ce maire écologiste qui aura développé encore le parc de vidéosurveillance, dans la digne succession d’un Gérard Collomb dont on ne savait plus bien, au bout d’un moment, s’il était vraiment de gauche ou s’il avait basculé à droite ?
Faut-il vraiment que nous inscrivions cela à notre bilan politique ?

Personnellement je ne le crois pas et de chaque élu qui constitue le groupe LYEC aucune voix n’ira en soutien au redéploiement ou à l’installation de tels dispositifs.
Je passe bien entendu sur leur efficacité toute discutable, comme l’atteste le dernier audit commandé par la Ville
Je passe enfin sur le symbole et le message qui serait adressé aux citoyens attachés aux libertés individuelles et collectives si une telle décision était prise.

Je voudrais toutefois rappeler que sur ce sujet : il n’y a pas de vérité et pas de mensonge, mais bien des visions différentes, des options philosophiques et politiques propres à chacun et qui parfois s’opposent

Pour notre part, LYEC s’inscrit dans une longue tradition de la gauche républicaine qui préfère l’humain à la technologie, et qui se rangera toujours du côté de la colère du peuple quand l’Etat devient violent et répressif.

J’en viens maintenant à mon troisième point qui n’est pas sans rapport avec les autres.
Nous avons appris dans la presse, la décision de la Région Auvergne Rhône-Alpes de supprimer près de 150 000 euros de subventions au Théâtre Nouvelle Génération car son directeur, Joris Mathieu, aurait été trop critique vis-à-vis de la politique de la Région.

Quel est ce monde où des subventions sont allouées en fonction des opinions politiques ou syndicales des demandeurs ? Et quel est cet homme qui, pourvu d’un tout petit pouvoir, décide tout seul de mettre en difficulté un équipement culturel  d’ampleur nationale ?

Ce monde c’est le nôtre, et cet homme qui, par goût pour l’autoritarisme, dresse des ponts entre la droite et l’extrême-droite, c’est Laurent Wauquiez.

Là aussi nous voulons témoigner à Joris Mathieu, ses équipes, mais aussi à toutes celles et ceux qui ne considèrent pas la culture comme une activité non-essentielle, notre solidarité et notre soutien.

Pour conclure,
A une époque où militer et avoir des opinions de gauche ou écologiste est devenu potentiellement suspect.
A une époque où une partie de la droite dérive de plus en plus vers l’extrême-droite.
Nous appelons à la vigilance
Et il me semble nécessaire, ne serait-ce que par respect pour les citoyens qui nous ont élus d’affirmer notre vision du monde et surtout, de prendre les décisions qui ne laissent aucun doute quant à notre identité politique.

Je vous remercie.