Propos liminaire de Mme Nathalie Perrin-Gilbert « Il appartient au groupe écologiste de ne pas se comporter en groupe hégémonique»

Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs les élu.es, Mesdames et Messieurs,

Après l’interruption estivale, notre séance publique est une séance de rentrée pour notre assemblée, et permettez-moi de nous souhaiter, à tous et toutes ici, une saison 2024/25 faite de débats, d’écoute, de travail commun au service de notre ville, de ses habitantes et habitants, de ses acteurs économiques, sociaux, culturels, associatifs ;  une saison faite aussi de respect et de considération pour nos agents, ces femmes et hommes qui travaillent pour notre ville sans toujours pouvoir y habiter car Lyon est devenue une ville trop chère aussi pour celles et ceux qui la servent pourtant au quotidien.
Je souhaite la bienvenue à Jean-Dominique Durand, qui revient sur ces bancs ; et j’envoie un message amical à Yann Cucherat qui a renoncé il y a quelques jours à son mandat municipal pour se consacrer à l’Agence nationale du sport et succéder à Claude Onesta. J’ai été en désaccord profond avec lui, notamment au moment des décisions prises au sujet du stade de Gerland. Cela ne nous a jamais empêché de nous apprécier humainement et d’échanger régulièrement.
Je salue bien-sûr notre collègue Sandrine Runel, élue députée le 7 juillet dernier et qui continuera de siéger à nos côtés en tant que conseillère municipale et co-présidente avec Philippe Prieto du groupe socialiste, la gauche sociale et écologique.

J’ai parlé à l’instant de saison 2024/25, car comment ne pas avoir ici quelques mots à propos  du mauvais spectacle politique de ces dernières semaines, depuis la dissolution de l’Assemblée Nationale annoncée le soir du 9 juin 2024 par un Président de la République, infantile et vexé, jusqu’à l’annonce d’un nouveau gouvernement le 21 septembre dernier, un gouvernement à la composition jusqu’à présent incomplète puisqu’a été oubliée la délégation du Handicap.
Cet oubli est impardonnable pour les personnes porteuses de handicaps visibles et invisibles, pour leurs familles, pour nous tous et toutes. Elle est politiquement injustifiable. J’y vois pour ma part une absence de considération et de responsabilité. J’y vois un signe supplémentaire que l’intérêt général, le bien commun et humain, la cohésion sociale ne sont pas une grande préoccupation des hommes et femmes qui s’apprêtent à nous gouverner, ni de leurs conseillers et conseillères.
La considération et la responsabilité ne sont pas au rendez-vous non plus, et c’est une évidence, quand face à des électeurs et électrices qui ont pris massivement le chemin des urnes en juillet dernier pour choisir le front républicain face à la menace de l’extrême droite, on oppose un gouvernement qui n’aura de cesse, pour tenir, d’aller chercher des gages auprès de l’extrême-droite. Madame Le Pen, elle, savoure ce moment médiatique et politique.
Voici comment l’on passe d’une mauvaise comédie à une mauvaise farce qui pourrait bien vite tourner au drame.
Et le drame, si l’on veut bien regarder, est déjà là. Dans nos rues, dans nos parcs, sous nos ponts, à l’entrée des gares, avec des femmes, des hommes et des enfants qui sont de plus en plus nombreux à chercher de quoi manger, se soigner, se loger dignement, s’éduquer.
Et ce n’est pas fini au regard du déficit public dont on apprend qu’il s’élèvera vraisemblablement au-dessus de 6 % en 2024. Des choix drastiques devront être effectués par le gouvernement et il est probable que l’Etat demande encore une fois aux collectivités territoriales de contribuer à la réduction des dépenses publiques.

Face à cette situation nationale, et je n’ose même pas aborder la dimension internationale, notre responsabilité à gouverner ici est plus que jamais convoquée. Notre considération à l’humain aussi.
Au sujet de la considération à l’humain, je fais partie de celles et ceux qui se sont émus de la décision unilatérale de la Métropole de Lyon de couper court à l’hébergement des femmes isolées avec enfants de moins de trois ans durant l’été, espérant sans doute qu’au mois de juillet cela passerait inaperçu. Mais c’était oublier la parole forte à Lyon des acteurs associatifs.
A ce sujet, je voudrais modérer –et j’en suis désolée, les motifs d’espérance exprimés tout à l’heure par M. Képénékian et Mme Borbon sur un retour à des pratiques plus humanistes de la part de la Métropole, en fait simplement un retour à des pratiques conformes à ses obligations légales.
Il apparaitrait en effet que les conditions mises en place par la Métropole pour héberger les femmes seules et les enfants de moins de trois ans, et contenues dans une note diffusée en interne des services métropolitains, ne seront ni applicables ni tenables pour les travailleurs sociaux. De fait, et de nouveau, des nourrissons risquent de connaitre la rue à leur sortie de maternité. Le fameux retour en arrière de la métropole n’a, dans les faits, pas eu lieu.

Concernant notre responsabilité à gouverner ici, l’ordre du jour de notre conseil municipal l’interroge.
D’abord dans notre rapport au privé. Ainsi, notre groupe votera contre la nouvelle cession des droits immobiliers réels sur Gerland car nous n’acceptons pas de poursuivre ce qu’a précédemment fait l’exécutif de Gérard Collomb sur ce quartier : permettre sa vente à la découpe au profit de quelques actionnaires qui spéculent à n’en plus finir sur notre bien commun, notre sol.
Ensuite dans le rapport à la majorité. Il appartient au groupe écologiste de ne pas se comporter en groupe hégémonique qui ne respecte pas ses partenaires. Que dire quand une adjointe écologiste démissionne du conseil du 8e arrondissement et qu’elle n’est pas remplacée car si elle l’était ce serait par une élue socialiste ou Lyon en Commun ? Que dire quand après la démission à son poste d’adjointe de Sandrine Runel, socialiste, vous remettez sa délégation à deux élues écologistes ? Ce n’est pas ainsi, Monsieur le Maire, que vous parviendrez à conforter votre bloc majoritaire.
Ce n’est pas ainsi non plus que vous conviendrez les Lyonnaises et les Lyonnais en 2026. Car l’écologie ne peut être hégémonique non plus dans la vie réelle et prendre le pas dans la ville sur l’ensemble des autres sujets, sociaux, économiques, culturels, entre autres.
A ce propos, j’ai lu dans un hebdomadaire lyonnais que Madame Henocque estimait que la culture était « par nature écologique ». Je ne commenterais pas ces propos, ce serait maladroit de ma part. Mais je tiens à dire en revanche d’une manière plus globale que rien n’est « par nature ». Ou alors si on considère que tout va bien « par nature », le politique n’a plus de place ! Et dès lors il ne sert à rien de s’engager.

Mes propos sont critiques, car en m’écartant de votre exécutif Monsieur le maire, vous m’avez permis cette parole plus libre. Mais ils ne sont pas une attaque, car nous sommes en 2024 et il est encore temps pour les Ecologistes de rectifier leur trajectoire.